Decouragement a magellan


DEMI TOUR A MAGELLAN

DETROIT DE MAGELLAN
DUNGENESS POINT JEUDI 02 JANVIER 2003
 
LAT.52°21'935 S.  LONG. 068°23'360 W.
La nuit au mouillage a été très dansante, le bateau roulait dans la houle, le vent sifflait fort dans les haubans. Nous n’avons pas beaucoup fermé l’œil : aux aguets pour savoir si notre ancre ne dérapait pas, si le vent soufflait toujours du même sens.
 Notre départ demain matin semble compromis, patience, il y aura forcément un calme et un changement de temps, la seule préoccupation et qu’il coïncide avec les heures des marées.
La température au réveil dans le bateau est de 8°. Marie-Ange a allumé le poêle avec une facilité remarquable, pas une fumée, il nous donne très vite une température douce très appréciée.
Des centaines de pingouins nagent autour du bateau, toujours l’air inquiet, l’œil aux aguets, sans cesse prêts à plonger à la moindre alerte, il y en a toujours un qui appelle d’un son grave presque comme si un humain nous hélait ; la mer agitée ne semble pas les gêner.
Au changement de marée, sous l’effet du courant, nous restons en travers de la houle forte, maintenant notre position devient très inconfortable.
 Un hélicoptère qui fait la liaison terre plate forme pétrolière est venu faire un vol stationnaire juste à coté de nous à hauteur de notre mât, Marie-Ange fait un signe du pouce pour dire que tout va bien, il est reparti.
Le deuxième soir, le vent est subitement moins fort au bon moment de la marée, maintes remarques disent que la nuit est plus propice parce que le vent moins fort.
 Vingt heures trente nous voila donc en route vers le premier goulet et nous sommes plein d’espoir, voiles et moteur nous avançons à trois nœuds le courant est encore faiblement contre.
Attentifs aux nombreuses plates-formes qui sèment le détroit, dans l’ensemble bien éclairées mais certaines, qui semblent abandonnées, ne le sont pas.
Marie-Ange à la barre, pousse un cri, un énorme rocher lisse comme un gros galet émerge à peine.
il est là à trois mètres, la collision est inévitable, nous sommes venus coque contre roc sans bruit, sans heurt, sans mal : le galet est une énorme baleine se reposant en surface, réveillée par le frottement elle s’est laissée couler sans mouvement brutal, sans peur, s’enfonçant tranquillement tandis que nous passions.
Nous craignions une mauvaise réaction, un vigoureux coup de queue, rien, une douceur dans la manœuvre, surprenant compte tenu de la taille de l’animal.           
Le vent monte, la mer aussi, nous avons tout « dans le nez », notre vitesse ne dépasse jamais 4 nœuds alors que 7 nœuds sont indispensables pour arriver à temps à notre but. Avec une déception énorme nous faisons demi-tour et regrignotons dans la nuit les 12 miles effectués.
La nuit est noire, l’œil vigilant à cause des installations de pompage de gaz, dont certaines éteintes, nous sommes de retour à 1h45 du matin.
 Nous  remouillons parmi les pingouins.
Le lendemain et troisième jour, le vent est si fort de 45 à 50 nds, que la houle atteint deux à trois mètres de creux rendant notre position plus qu’inconfortable et extrêmement dangereuse.
 Malgré la deuxième ancre, nous dérivons très lentement vers le cap VIRGENES, notre G.P.S. nous renseignant seconde après seconde, nous décidons de partir.
 Le bateau monte et descend dans les vagues, l’avant s’enfonçant sous l’eau puis se redressant deux mètres au- dessus de l'eau.
 Pour le mouillage que je récupère habituellement en 35 minutes avec le guindeau manuel cette fois ci, il me faut une heure et demie, mettant toutes mes forces sur le levier, récupérant cinq centimètres par cinq centimètres.
 Trempé, transi, épuisé avec en plus l’angoisse de voir le cap VIRGENES se rapprocher dangereusement et de penser que nous allons nous échouer sur son extrémité.
 Finalement en extrayant la première ancre, nous avons balayé le fond et accroché la chaîne de la deuxième que nous remontons en même temps. J’ai pu dégager la chaîne de la première, libérer le cordage qui suivait le larguant en catastrophe après avoir fixé à son extrémité, deux bouées restant en surface marquant ainsi notre passage à MAGELLAN, laissant définitivement hélas, notre ancre à jas toute neuve (mais elle surjatait!).
 La mer fumait sur un mètre de hauteur .
Nous avons pris la fuite devant une mer énorme, avec des creux monstrueux soulevés par un vent qui hurlait de plus en plus. A sec de toile nous filions vers le nord à la vitesse de 4,5 nœuds.
Adieu MAGELLAN, nous y étions pourtant arrivés.
Le problème a été
que ni l’Armada ni la Prefectura n’a voulu ou pu nous renseigner utilement ;
que nous avions une deuxième ancre trop lourde et mal adaptée,
que le mouillage à DUNGENESS n’est pas un mouillage abrité, ouvert à presque tous les vents et surtout au sud ouest si violent ; il n’existe aucun abri pour attendre, peut être aussi n’avions pas eu de chance car pas un seul répit dans le mauvais temps excepté le jour de notre arrivée.
La fatigue, le manque de sommeil, le mauvais temps continue, les rugissements ininterrompus du vent sont certainement des facteurs démoralisant à la longue. Nous filons donc en direct jusqu’à MAR DEL PLATA, 1070 milles plus au nord sans avoir de but précis pour l’instant.
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